Illusions d’Optique
La vision occupe environ un tiers de notre cortex cérébral. Quand vous ouvrez vos yeux et jetez un coup d’œil dans cette pièce, des milliards de neurones et des milliers de milliards de synapses sont à l’œuvre. C’est un peu surprenant dans la mesure où quand nous pensons à notre vision, nous la voyons comme un appareil photo. Elle prend juste une image objective de la réalité. L’œil a une lentille qui concentre une image sur l’arrière de l’œil où se trouvent 130 millions de photo-récepteurs, donc on peut comparer l’œil à un appareil photo de 130 mégapixels. Mais ça n’explique pas les milliards de neurones et les milliers de milliards de synapses mobilisées. Que font ces neurones ? Eh bien, la neuroscience nous dit qu’ils créent, en temps réel, toutes les formes, les objets, les couleurs et les mouvements que nous voyons. Comme si nous prenions un cliché de cette pièce telle quelle, mais qu’en fait, nous construisions tout ce que nous voyons. Nous ne construisons pas tout en une seule fois. Nous construisons ce dont nous avons besoin à un moment donné.
( extrait de « Voyons-nous la réalité telle qu’elle est ? » Donald Hoffman – TED talks )
Observe ces oeuvres de Victor Vasarely
Dans cet exemple, nous ne voyons toi et moi pas les mêmes formes apparaitre…puis disparaitre pour se transformer selon que le regard est plus ou moins assoupli ou focalisé. Je peux moi-même y voir différentes formes selon mon regard.
Si je change ma façon de regarder une chose, cette chose change : elle change, c’est-à-dire qu’elle prend une autre signification, un autre sens.
Mais cette image est plate, totalement plate. Je n’arrive même pas à voir cette simple et autre réalité, tellement mon cerveau est conditionné à reconnaitre des formes.
A partir de là : Notre perception du monde ne se limite pas à cette digression par les œuvres de Victor Vasarely. Nous pensons voir tout un tas de choses, c’est ok, mais c’est lorsque nous les prenons pour des vérités que ça commence à nous mener vers l’erreur.
On pensait que la Terre était plate car ça y ressemblait. Ensuite, nous avons pensé que la Terre était le centre immuable de l’univers parce que cela y ressemblait. On se trompait. Nous avions mal interprété nos perceptions. Dans notre vraie vie il en est de même. Nous ne voyons pas, nous interprétons. Je cite l’exemple de cette femme privée de son enfant par les services sociaux, sa petite fille présentait souvent des « traces de coups » selon le médecin.
Après une longue procédure, elle a récupéré son enfant et a pu la soigner : en fait, la petite fille souffrait d’une maladie qui provoque des ecchymoses. Donc, ce qui était visible était vrai, la petite fille avait des bleus. Mais ce que certains ont cru voir était faux.
Il aura fallu l’ouverture d’esprit d’un médecin puis ensuite l’aide d’un avocat pour que ce qui était aussi évident que le nez au milieu de la figure soit admis comme faux.
Aujourd’hui nous savons bien que la Terre n’est pas plate, mais nous avons beaucoup d’autres croyances, et parmi celles-ci un certain nombre nous mènent à des actes qui sont erronés et même nocifs. Mais nous ne le savons pas, pas encore.
Il faut se méfier de ce que nous nommons trop rapidement la réalité. Nous avons besoin de tous ces raccourcis pour ne pas devoir traiter chaque image qui se présente à nos yeux de façon neuve, et donc reconnaitre une petite fille, des bleus, et son contexte familial à savoir entourée d’une mère, ainsi que savoir reconnaitre la valeur à-priori de la personne qui a fait le signalement. Mais tous ces éléments ne sont que des interprétations, que nous prenons pour des certitudes au point de réfuter le mot d’interprétation : j’entends tellement souvent dire « mais tu vois bien, ce sont des faits ! »…
Autour de nous, les faits sont rares, finalement : il fait jour, il pleut, sont des faits. Il fait chaud n’est pas un fait. On peut dire qu’il fait telle température mesurée sur l’échelle de Celcius.
Je vous laisse, je retourne encore une fois sur les images de Vasarely et je reconsidère encore une nouvelle fois ma conception de la réalité. Car la remettre toujours en doute me permet de ne pas trop m’identifier à ma « carte du monde » …